mercredi, 13 décembre 2023 09:36

Aurec-sur-Loire : des collégiens des Gorges de la Loire en Pologne pour rencontrer l'Histoire

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Ce lundi 11 décembre, c'est une rencontre poignante qui attendait les élèves de 3e du collège public des Gorges de la Loire. Leur voyage scolaire en Europe de l'est s'ouvrait avec la rencontre exceptionnelle de Lidia Maksymowicz, rescapée des camps d'Auschwitz-Birkenau.

Dès le début de l'année scolaire, les élèves de 3e ont été associés à la préparation de leur voyage, avec l'étude de nouvelles sur le fascisme et le totalitarisme et la participation à la représentation de Matin brun en français, l'étude d'extraits de Si c'est un homme de Primo Levi en italien, des camps catalans et nord-africains en espagnol.

Fin septembre, Arnaud Beunaiche, des ateliers de La Belle inutile, a consacré une semaine de travail à la mise en scène de la pièce Qui rapportera ces paroles ? de Charlotte Delbo que les élèves ont jouée devant leurs pairs le 28 septembre. Ils ont également découvert des témoignages de déportés dont ils ont proposé la lecture d'extraits à leurs parents lors de la réunion d'informations du voyage et à leurs camarades quelques jours avant le départ durant le quart d'heure lecture. 

Et dimanche matin à 8h, ils prenaient le départ pour la Pologne.


"Moi je vais vous parler du sort des enfants"

1700 km et 24 heures plus tard, sitôt arrivés à Cracovie, c'est au sein du musée des Juifs de Galicie que les élèves ont commencé leur visite et rencontré Lidia Maksymowicz. Cette dame, de 70 ans leur aînée, leur a raconté l'horreur du camp de Birkenau : "Moi je vais vous parler du sort des enfants car je suis un de ces enfants qui ont survécu." En effet, arrêtée dans une forêt avec des opposants politiques alors qu'elle n'avait que trois ans, elle a été mise dans un wagon avec sa mère et ses grands-parents et déportée. Elle se souvient encore du paysage épouvantable au sortir du train, des soldats armés, des fusils tournés vers eux, des chiens, de l'air bizarre autour d'eux provenant des cheminées. C'est la dernière fois qu'elle vit ses grands-parents. Puis vint la mise à nu, la désinfection au tuyau d'arrosage, le rasage, le tatouage que Lidia Maksymowicz montre aux élèves. "Nous étions dépourvus de notre dignité, de notre humanité, de notre identité."

Après la sélection et la quarantaine, elle fut séparée de sa mère et mise dans un baraquement avec les autres enfants. Elle raconte alors aux élèves les conditions de vie exécrables, la soupe, la tranche de pain sans beurre, une boisson faite avec des glands, les bébés que l'on noie à leur naissance et leur mère qui nourrit les autres enfants de leur lait, le moral en berne...  Mais pourquoi?

"J'ai survécu grâce à la Providence"

Pourquoi gardait-on des enfants vivants? Pour faire des expériences. "On testait de nouveaux vaccins, on essayait des gouttes pour changer la couleur des yeux; heureusement, pas de gouttes pour moi, les miens étaient déjà bleus". Et c'est le "docteur" Mengele, celui que l'on appelait "l'ange de la mort", qui officiait. Comment a-t-elle pu survivre dans cet enfer? Lidia Maksymowicz nous l'explique : "J'ai survécu grâce à la Providence, chaque heure était un miracle. Je suis l'enfant qui a survécu le plus longtemps. Je le dois à ma mère,  elle avait 22 ans. C'était une femme forte,  solide. Elle creusait des fossés pour agrandir le camp. Et la nuit, elle m'apportait de la nourriture en rampant. Si elle avait été repérée, elle aurait été tuée. Je ne me rappelle plus son visage, mais ses mains avec cette nourriture, je m'en souviens." Puis, elle raconte la libération du camp, son adoption par une famille d'Oswecim, les difficultés à vivre après ça, et les difficiles retrouvailles, à Moscou, avec une mère qu'elle croyait décédée dans les camps.

"C'est à vous de veiller pour que ça n'arrive plus jamais"

Ainsi préparés, l'après-midi même, ils iraient  découvrir le Kazimierz, quartier qui témoigne de l'importance de l'implantation de la culture juive à Cracovie, sa synagogue, son cimetière juif... Au crépuscule, il serait appréciable de souffler et de profiter du traditionnel marché de Noël de Cracovie avant d'aller prendre quelques forces pour pouvoir se rendre, le lendemain, aux camps d'Auschwitz et de Birkenau...

Et Lidia Maksymowicz de conclure : "Mon devoir est de raconter, pour ceux qui n'ont pas survécu. Vous êtes l'avenir. C'est surtout aux jeunes que je m'adresse en leur disant de ne pas oublier. C'est à vous de veiller pour que ça n'arrive plus jamais."

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