Une page se tourne à Montfaucon-en-Velay avec la démolition de trois anciennes maisons qui abritaient des commerces du village.
Décédé depuis six ans, Camille Béal – surnommé le Belou - a été l'une des grandes personnalités du village. Son épicerie et magasin de fruits et légumes, regorgeait d'une multitude de produits que nul n'aurait eu le courage de comptabiliser. Il suffisait de demander et « la Guitte » indiquait le bon endroit pour trouver son bonheur. Son magasin était ouvert de 6 heures à 21 heures. Ouvert 365 jours de l'année. Fermé une heure ou deux de manière épisodique, lorsqu'il fallait assister à l'enterrement d'un proche.
Les plus jeunes n'ont pas connu son mari Camille, une personne atypique, apportant chaque jour à Montfaucon une humeur égale ainsi que des fruits et légumes de la Vallée du Rhône avec son camion orange. Le moteur éteint, il venait taper dans le ballon quelques instants avec les jeunes. Un cri de victoire et les bras au ciel lorsqu'il parvenait à mettre un but. Toujours la cigarette au bec.
Très généreux, Camille rejoignait l'un des deux bars voisins – Gouit ou Guillot – afin d'offrir une tournée. On jouait aux cartes. On parlait ragots, politique (petite ou grande) mais aussi football. Les jours de foire, c'était la fête. Maquignons et agriculteurs venaient trinquer après la vente du bétail.
Une boulangerie renommée pour son pain de seigle et ses brioches aux pralines
La boulangerie voisine a connu plusieurs changements de propriétaires. Les demoiselles Bachelard ont exploité la boulangerie du carrefour jusqu'en 1975, avec l'aide d'un ouvrier. Marie se tenait au comptoir et Victoria livrait le pain à domicile, avec une charrette. Après six ans d'apprentissage à Antibes, Michel Petit, originaire de Montregard, reprend l'exploitation avec son épouse Monique. Quelques travaux de rénovation ont lieu, avec le remplacement du vieux four à bois, et l'achat d'équipements plus modernes. La boulangerie Petit sera renommée pour son pain de seigle, ses brioches aux pralines...
Là aussi, les heures de travail étaient nombreuses, notamment durant le printemps et l'été (nombreuses commandes de gâteaux à l'occasion des baptêmes, communions et mariages). Michel faisait le tour de l'horloge dans son laboratoire (de minuit à midi), avant de préparer la pâte pour le lendemain, en fin d'après-midi, après une bonne sieste. Les journées de travail s'allongeaient durant l'été, par exemple lors de la grande vogue de juillet, où il débutait en quelque sorte sa journée de travail vers 22 heures, au moment du passage des chars dans les rues du village.
Quand les pompiers étaient près de la boulangerie
Il y avait beaucoup de vie le dimanche après-midi, lors de la garde des sapeurs-pompiers (la caserne était alors située près du carrefour) puis lorsque les citadins quittaient leur maison de campagne pour rejoindre Saint-Etienne ou Lyon, en apportant un pain de seigle ou une brioche. Face à la demande, le boulanger pouvait lancer une dernière fournée de seigle à 17 heures. La soirée se terminait autour d'une partie de coinche avec quelques figures locales comme Jacky Vachon ou Raymond Gibert.
Après vingt ans d'exploitation, Michel et Monique Petit laisseront leur place à la famille Boulagnon qui agrandira le laboratoire avec l'achat du bistrot Guillot, puis plus tard à la famille Giraud.
En face, des commerces disparus
Les bâtiments de l'autre côté du bas de la rue centrale ne sont pas voués à la disparition, mais plusieurs commerces occupant le rez-de-chaussée, ont aussi disparu. Jean et Jacqueline Dufau (décédée récemment) ont exploité la boucherie voisine du Credit Agricole, avant de partir à Yssingeaux. Ils avaient ensuite été remplacés par Alain et Geneviève Saniel. A quelques mètres, le café Gouit, puis la maison de Georges et Marie-Thérèse Michel qui vendaient de la laine, des vêtements, et proposaient des services de couture.
C'était aussi une vie entre commerçants et leurs enfants. On se rendait de menus services. L'un d'entre eux invitait les autres un soir et chacun amenait en sa spécialité : légumes, fromage, viande, pain, gâteaux, alcool....
Démolition à partir du 20 juin
Plusieurs personnes mentionnées ici sont décédées. Trois bâtiments de ce bas de la rue Centrale sont en cours de démolition. La démolition à proprement parlé est prévue à partir du 20 juin. Outre le souvenir ému, certains riverains évoquent l'idée de donner des noms de rue en mémoire de ceux qui ont fait vivre le bourg. Une rue « Camille Béal » en souvenir de cette époque révolue par exemple...