mardi, 11 juillet 2023 12:42

Natation : Antoine-Romain Rozwadowski médaillé d'or aux European Masters Games en Finlande

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De quoi s'agit-il ? À la différence des championnats d'Europe de natation "maîtres" organisés par la LEN (ligue européenne de natation) à la suite des championnats "élites" (les derniers ont eu lieu à Rome en août 2022), les Masters Games regroupent une grosse trentaine de sports différents, dans une même ville, pour environ deux semaines. Il existe des jeux continentaux, et des jeux mondiaux, tous les 4 ans. Ils ne peuvent s'appeler "jeux olympiques Masters", car ils ne sont pas organisés par le CIO, et les deniers ne terminent pas dans les mêmes poches...

Cette année, Tampere, deuxième plus grande ville de Finlande, accueillait donc quelques milliers de sportifs de plus de 25 ans. À la descente des avions, dans les trains reliant Helsinki à Tampere, on pouvait clairement distinguer les athlètes : lui avec une pagaie, l'autre avec des clubs de golf, ceux-là portant fièrement la marque la plus connue des nageurs... Tiens, des nageurs !

La suite est racontée en long, en large et en travers par Antoine-Romain Rozwadowski.

"Where are you from ?

- Portugal, Ireland, UK, Germany, Neederland, Spain, etc. la liste est longue."

On retrouve des visages connus : "On a fait l'eau libre à Rome, on était à côté au départ", ou encore "cette fois, au 400, je te laisse pas partir !". Mais toujours dans la bonne humeur. Nous sommes tous un peu vieux maintenant, et si on aime se dépasser, la compétition, éventuellement gagner, nous sommes tous amateurs, et le plaisir (de la souffrance !) et de se mesurer les uns aux autres, ou encore de se rencontrer sont, à tous, nos principaux moteurs.

Décalage et sommeil

Parti de la maison à 6h du matin mercredi, après un peu de voiture, d'avion, de métro, de train, de tram et enfin de marche, j'arrive à mon Airbnb. La mamy m'accueille chaleureusement, avec des sandwichs au pain complet, beurre, gouda et blanc de poulet. Ça fait 13h que je suis parti, je réalise qu'il y a une heure de décalage avec Paris, à prendre en compte pour les horaires des courses.

Je prends congé rapidement, même si elle a très envie de papoter... Le sommeil fait partie intégrante de la performance. Déjà que dormir dans un nouvel environnement peut être perturbant : phase d'endormissement prolongée, réveils plus fréquents, sommeil lent profond parfois raccourci ; il ne s'agit donc pas de contracter une dette de sommeil dès le premier jour.

Ce qui me tracasse un peu, c'est de ne pas avoir pu nager aujourd'hui. C'était juste impossible, avec le voyage. Hier, on a fait un peu de vitesse, des allures, j'étais pas trop mal.


Championnats de France puis Europe en deux semaines

La difficulté de cette fin de saison, c'est d'enchaîner les championnats de France été (qui ont eu lieu à Antibes) et ces jeux européens, le tout en 15 jours. Être prêt, au top physiquement, sur deux compétitions à deux semaines d'intervalle, c'est un peu la quadrature du cercle. Faut-il se reposer ? A nouveau solliciter, au risque d'être fatigué ? Un peu par flemme, peut-être, j'avais imaginé la première solution. Mon coach, Grégory NARCE, lui, opte plutôt pour la seconde. Sur le coup, je fais un peu la tronche, il va encore falloir aller dans le mal.

Heureusement, les juniors/séniors du club préparent les championnats de ligue à Vichy, qui se déroulent pile en même temps. Eux aussi vont devoir souffrir, et nous allons nous aider mutuellement à sortir de notre zone de confort. Quelques séries à VO2, d'autres en lactique, les muscles brûlent, on s'encourage : "lâche pas gros, c'est maintenant, c'est maintenant que ça compte !". Je vois mes coéquipiers rouges comme des pastèques, Damien (TEIXEIRA FERNANDES) le souffle court, haletant, accroché à la ligne d'eau tel un coquillage à marée basse, Nathan GUERRA guère plus frais, dont le bonnet glisse vers le haut de son crâne, et qui par manque de lucidité ne s'en rend pas compte, Quentin VALLA, sprinter de son état, qui "charge" plus que de raison dans ce genre d'exercices.
Et puis il y a Esteban SAJOUS, monté dans le groupe 1 cette saison, 15 ans, qui vient nous bousculer. Il a vraiment affolé les chronos cette saison. Et si sa technique nous laisse souvent pantois (car très largement perfectible), sa résistance au mal et sa volonté nous mettent un bon coup de pied au derrière.

Enfin, les filles, Ambre GAUCHER, et Noémie TEIXEIRA FERNANDES ne sont pas en reste. Elles deux, également, montrent une envie certaine et une tolérance à la douleur élevée.

"Team work and the dream works !"

Et moi là-dedans ? Je profite de l'état d'esprit du groupe pour aller titiller mes limites. Sans eux ? Jamais je ne pourrais mettre autant d'intensité. Natation : sport individuel qui se pratique en équipe. Comme je leur dis parfois : "team work and the dream works !"

Jeudi, je vais dans le centre de Tampere, au Ratina Stadium, où se déroulent les épreuves d'athlétisme. Une bien sympathique agitation. Je récupère mon accréditation, qui donne accès gratuitement aux transports publics, au stade nautique et aux casiers, tout étant magnétique. Les petits cadeaux de bienvenue : un sac à dos de sport, une bouteille-gourde siglée de l'événement, des électrolytes, et d'autres babioles.

Tram, direction la piscine. La ville a attendu des dizaine d'années un centre aquatique digne de ce nom. Ils n'ont pas fait dans la demi-mesure. En intérieur : un bassin de 50m avec 8 lignes, un bassin de 25m 8lignes, une fosse avec plongeoirs à 3m et 5m, et des bassins annexes. A l'extérieur : un bassin de 50m 8 lignes d'eau, une fosse avec plongeoir à 3m, 5m, 7m et 10m, et des bassins annexes. Des saunas, un cylindre avec de l'eau à 6 degrés...

Le jeudi, le complexe est ouvert au public, même si le grand bain intérieur est réservé aux compétiteurs. Petit choc des cultures, dans les pays scandinaves, la douche savonnée est obligatoire avant de gagner les bassins. Et elle doit impérativement être prise tout nu ! Là-dessus, vous ajoutez les filles qui viennent avec leur papa, et le tableau est troublant pour les méditerranéens que nous sommes. Latins/scandinaves, Europe du Sud/Europe du Nord, les malaises sautent aux yeux.

Qu'est-ce que je fais ? Un échauffement, 1000m, peut-être plus, en fonction de l'état des triceps, de la technique dans les quatre nages, histoire de trouver des appuis, puis des allures. A Antibes, j'ai retrouvé mon ancien coach (de quand j'étais jeune), Gilles BORNAIS : "toi, t'es un train de marchandises, réduis tes temps de départ quand tu fais tes allures, pour mettre en route les bonnes filières."

Tout est calé pour le lendemain. Reste à aller faire un tour au K-Market pour préparer les repas des jours suivants. Rien d'exceptionnel : féculents, viande blanche, fruits, légumes, produits laitiers. Il s'agit de coller au mieux aux habitudes pour ne pas déranger le microbiote. Un deuxième cerveau, paraît-il... Alors j'essaie de prendre soin de ces bactéries, virus et autres levures qui colonisent mes boyaux.
Les jeunes ont dû arriver à Vichy. "Vous vous sentez comment ? - On va faire péter !"


Des courses à distance

Le vendredi matin, ma première course, le 800m, se déroulera après leur 400. Je suis attentivement leurs performances sur Internet. Damien et Esteban passent au travers. Je suis dégoûté pour eux, et en même temps, ça me stresse. "Qu'est-ce qu'ils ont foutu ? C'est quand même pas la préparation, l'affûtage, qui aurait foiré ?"
Je m'empresse de leur écrire, pour savoir.
"Dur de rentrer dans la compétition" m'écrit Damien. "Jamais fais un 400 aussi dur" commente Esteban.

Pas très rassurant... J'essaie de trouver des mots pour les réconforter, et me réconforter avec. Ils ont encore le 1500, avant que je nage mon 800.
Entre temps, les résultats du brevet sont tombés : mentions très bien pour Ambre, Noémie et Esteban. "Des machines !"
Les sprinters Nathan et Quentin font le job.
Damien réalise sa meilleure perf sur le 1500, et Esteban rend une copie propre. "Pars grand, en amplitude, sans t'affoler" me conseille Damien.

C'est l'heure, le speaker écorche mon nom, je crois que cognitivement, il est au bout de sa vie. J'ai l'habitude, je n'en fais pas cas.
"Take your marks. Bip !"

Les plots Pékin de Sainté

C'est parti. Je place mes mains l'une sur l'autre, je gaine et serre les fessiers pour que les pieds rentrent dans le trou d'eau fait par les mains. Pointes de pied tendues. Glisse. Deux ondulations, battements énergiques, reprise de nage, deux mouvements de bras, respiration, à droite.

J'ai bien bossé mes starts, lundi passé à la Plaine Achille à Sainté. C'est la seule piscine du coin avec des plots "Pékin", le système de starts utilisé à l'international. J'ai cependant bon espoir que les élus de la com com fassent le nécessaire pour en équiper le bassin de l'Ozen. Lundi, donc, j'avais demandé à une jeune femme qui nageait très correctement de me donner des ordres de départ. Vu son style de nage, je pensais qu'elle y était habituée. Elle m'a fait faire n'importe quoi ! "Dis, à vos marques, hop ! Et pas, prêt, partez ou je-ne-sais-quoi !". En attendant, on a bien rigolé et ça a permis de dedramatiser. Merci madame !

Je me sens costaud, mais faut pas s'emballer, 800m, ça peut-être long ! J'ai la sensation de prendre beaucoup d'eau, de gros appuis. Les dorsaux répondent présent. Le virage arrive. Culbute, position flèche, gainé, étirement maximum, glisse, ondulations, battements et reprise de nage. Après le 100m, je jette un œil sur le tableau d'affichage pour voir combien je suis parti. 1'05, propre.

Les longueurs s'enchaînent. J'ai pas trop mal. Pas encore du moins. Je vois le premier s'éloigner, il est trop rapide, je ne tente rien, par peur d'exploser par la suite.
Au passage du 400, je vois que je suis dans les temps que je m'étais fixés. "Si tu tiens, c'est la MPP (meilleure performance personnelle), celle de Châlon en 2019, avant Covid...


Deuxième du 800

Ça y est, ça commence à piquer pour de bon. J'essaie de rester propre techniquement. "Pense à t'allonger !". Rien n'y fait, les mitochondries sautent comme des pop corns les unes après les autres. Les mouvements raccourcissent. Entre 600 et 750, je suis vraiment dans le mal. L'allure chute. Dernière ligne droite, je mets les jambes à bloc, je sais que le podium n'est pas loin. "Respire plus maintenant". Il reste 15 mètres. "Allez, si, une dernière respi !".
2ème, pas de MPP, mais la forme est là. Le travail a payé, quoiqu'il arrive à présent, ces jeux européens sont réussis !

A Vichy, les bonnes performances et les finales s'enchaînent pour les jeunes. Je suis tellement content pour eux. Ils sont sérieux à l'école, bossent bien à l'entraînement, la France de demain ! Ambre met de grosses claques à ses records. Noémie fait un super 400. Ambre et Quentin se qualifient pour les finales du 100m brasse et du 50m papillon.

Tampere est une ville aérée. Pas désagréable. Pas de dinguerie architecturale non plus. Je pense qu'on peut réussir sa vie sans la visiter, et péricliter serein sans y avoir mis les pieds.

La cérémonie d'ouverture des jeux a eu lieu tandis que j'étais encore au boulot, et celle de clôture a lieu samedi soir. J'ai deux courses dimanche... Pour la fête, c'est râpé !


Enchaîner avec 200m brasse et 400m nage libre

Vendredi, il faut enchaîner 200m brasse et 400 nage libre. Ma stratégie est simple : pas de calculs. Disputer chaque course comme-ci c'était la dernière de la saison, et on verra après. "C'est à la fin de la foire qu'on compte les bouses", comme on dit à Bas en Basset le 11 novembre.

200 brasse, donc. Nom ecorché, "take your marks, bip". Et splash ! Enfin, pas trop d'éclaboussures quand-même ! Glisse, coulée, reprise de nage, virage, et puis l'acide lactique qui arrive à 75m. "Euh... C'est un peu tôt là...". "Serre les dents, ça va bien se passer". Encore une fois, quelques pop corn de mitochondries. La fin de la course est dure. Ce bassin, avec ses 4m20 de profondeur semble interminable. Les plaques jaunes approchent, touche à deux mains simultanées, coup d'oeil au tableau d'affichage : 2eme et MPP. Battu par un rosebeef, encore... Pfiou !
Je vais vite dans le bassin de récupération. Quatre ou cinq cents mètres, puis hydratation et chaussettes de récup qui favorisent le retour veineux. Fruits secs et pâte de dattes.

Pendant ce temps-là, à Vichy, le live m'indique qu'Ambre se qualifie en finale au 200m brasse, tout comme Damien et Nathan au 200 papillon. Ça y est, ils sont chauds, ils sont bien rentrés dans leur compétition. Damien enchaîne 200 papillon 200 nage libre et 400 quatre nages (course pour laquelle il entre en finale) en 1h20, j'ai mal pour lui, c'est beau la jeunesse...

Le 400 nage libre arrive. Je crois que je suis prêt. Prêt à en découdre. La course ? MPP et 2ème, et toujours battu par un sujet de sa Majesté. Ça commence à bien faire...

Récupération, hydratation, alimentation, la routine est prête. Rester à l'horizontale le plus possible, et refaire les stocks de glycogène pour la dernière journée.

200m papillon. C'est loin d'être ma spécialité, mais ça me faisait envie. Avant le départ, l'organisation passe toxicity, de system of a down. Ça me chauffe à blanc ! Je pars grand, jusqu'au 150 je suis avec le 2eme et le 3eme. Je pense pouvoir accélérer. J'essaie d'augmenter la cadence, mais rien ne se passe. La dernière longueur est catastrophique. Je les vois partir, impuissant. "Si quelqu'un retrouve une paire de triceps au fond de la piscine, ce sont les miens !".

Je préfère pas trop dire mon temps aux jeunes : ils m'ont éclaté ! Dans leur finale Damien fait sa MPP et bat son propre record du club. Nathan fait également une grosse perf. MPP et pas si loin de Damien. Il y a un an de ça, qui aurait mis un kopeck sur un 200 pap de Nathan à 2'22 ??

Vexé de ma quatrième place, je plonge illico à la récup. Je m'enfile un bidon d'électrolytes. Dans 1h20 à peine, j'ai ma dernière course : le 200m quatre nages. Avec les jeunes, on a une "running joke" à propos de cette course : "jamais deux sans trois, mais toujours 204 !"

Chaussettes de récup, je mange un tiers de barre énergétique, et je rentre dans ma bulle. Dernière course de la saison, faut aller solliciter les dernières fibres. Un pote slovène qui vient de voir la course me tapotte l'épaule d'un air désolé. Puis il pointe l'index sur sa tempe, montrant que désormais, c'est dans la caboche que ça va se passer.

Je mets les écouteurs. Appli de musique... j'hésite... Bonjovi, it's my life ? Rocky Story, War ? ACDC, thunderstruck ? Shaka Ponk, Palabra mi amor ?

Cette année, aux championnats de France hiver en petit bassin, je participe à 5 courses : 4 podiums, 0 victoire. Aux France été en grand bain à Antibes, 5 courses : 5 podiums, 0 victoire. Et sur ces jeux européens, pour l'instant, 4 courses : 3 podiums, 0 victoire. "J'en veux une, bord d'aile de merle !"

"It's my liiiiiiife, it's now or never..." Chantent mes écouteurs...

Premier et Meilleure performance personnelle

Dans la "calling room", je ne tiens plus en place. J'ai passé ma première combi, un peu démodée, mais c'est ma porte-bonheur : elle collectionne quelques titres de champion de France, six, je crois. Elle me fait flotter le derrière, sans pour autant garoter les ischios. Je tourne les bras, les épaules, tire sur les quadriceps, je sens l'adrénaline monter. Lunettes suédoises sur le nez, bonnet rose en place (j'ai perdu le vert, celui de cette année, au Puy), faut que ça commence, sinon je vais imploser.

En papillon, je suis bien. Je vire un peu derrière, mais c'est normal, ils partent tous, tout le temps, comme des fous. En dos, j'essaie de me mettre à bloc. Je pense à mon coach, Greg, qui me dit : "cadence, cadence, cadence !". J'essaie de tourner plus vite les bras. Je bois la tasse. Une fois. Super... Puis deux ! Génial... Je fais un assez mauvais virage. J'ai quatre secondes de retard sur le premier. Je dois être quatrième, à peu près... Il reste 100m, faut plus trier les lentilles maintenant. En brasse, je fais une grosse relance sur les jambes. J'essaie d'avoir un ciseau puissant, "lent, moyen, vite!", Au virage, je vois plus rien, dernière longueur de la saison, en crawl. "Aaaahhh" ! Je ferme les yeux, fais probablement un peu n'importe quoi, pense que la douleur n'est qu'une information. Touche. MPP, première place... "Ah, ben voilà !"

Une petite bière avec les copains de tous les pays pour fêter ça. Quand est-ce qu'on se revoit ? Doha 2024 ? Singapour 2025 ? "Keep in touch, and be safe !"

Je saute sur mon téléphone, pour voir ce qui se trame à Vichy. Encore de belles courses, de belles performances. Je suis avec un peu plus d'attention ce que font Quentin et Damien. Ils viennent d'avoir leur bac, avec de belles mentions. Quentin n'est arrivé au club que cette année, mais je crois qu'il a trouvé sa place immédiatement dans le groupe. L'an prochain, il part pour devenir gendarme. Damien, part en prépa. Quatre années passées à suer dans la même ligne, ça compte ! Les 2005 s'en vont, pour suivre leurs études, quoi de plus normal. Ciao Hannah FAURE ciao Hugo CROCFER et bon vent ! Vous viendrez nous voir, et peut-être même enfiler un maillot pour les interclubs ?

Si certains partent... D'autres prennent leur place. Ainsi, Cali PALTANi, Lalie BARRIÈRE et Mattéo-Esteban ROZWADOWSKI vont nous rejoindre. Parés à vous sentir vivants ?

Une journée à flâner dans Helsinki

Me reste une journée à flâner à Helsinki. Dans le train, je demande des infos pour visiter la capitale à une dame, qui m'envoie promener. Quelques minutes plus tard, un homme aux adipocytes hypertrophiés se place non loin. Je le questionne de la même manière. Aux premiers mots prononcés dans la langue de David Bowie, ses sourcils se mettent à danser la carmagnole. Panique à bord, il finit par balbutier : "si t'as quelques heures, fais un tour en ville !".
Merci, je n'y avais pas pensé, effectivement... Attends, je le note : tour en ville...

Enfin, tout près du but, la gare d'Helsinki, un couple pas piqué des vers s'installe à côté de moi. Bouteille de vodka, quasi vide, à la main, ils titubent jusqu'au siège. Elle, beauseigne, le visage ravagé par je-ne-sais-quel érythème, encombrée par des chaires en abondance, et lui... Lui... La bave qui coule de ses commissures... Il commence à me parler, crachant et postillonnant, répandant ses miasmes comme une tempête tropicale soulève les embrums dans les quarantièmes rugissants. "Nan mais t'es sérieux, mec !"
"Charabia, charabia", je ne comprends pas un mot. Par ailleurs, si tu pouvais remettre le blanc de tes yeux dans le bon sens, ça me foutrait moins les jetons... J'imagine qu'il n'y a pas que de l'alcool qui coule dans leurs veines. Au bout d'un moment, les neurotransmetteurs ayant enfin franchi, par quelque miracle de la chimie, quelques synapses, ils comprennent que je ne suis pas du pays. Sweet Jesus, pourquoi te sens-tu toujours obligé de me mettre nez à nez avec certains de mes congénères les moins frais ? Ils avaient tout le wagon pour se positionner... Je dois avoir la tête de l'emploi...

Petit tour dans Helsinki, good vibrations. Sur le port, tranquillement assis sur un banc en bois pour casser la croûte, un goéland se pose sur mon épaule pour piquer un bout de mon sandwich ! Surpris, je fais un bond. Je m'étale sur mon sac à dos, qui était à mes pieds. Dans un reflex de survie inouï, je colle le sandwich vers ma poitrine, pour le sauver de cet animal démoniaque qui voulait m'enlèver le pain de la bouche. J'ai gagné ! Maintenant, j'ai une nouvelle médaille. Une médaille de gras, côté coeur !

Dernière modification le mardi, 11 juillet 2023 12:57

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