mardi, 01 août 2023 10:00

Le Mazet-Saint-Voy : un festival autour des films d'Alain Resnais

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En prolongement de la conférence Mémoire et devoir de mémoire en juillet, un festival Alain Resnais est proposé à l'Aulagnier Petit au Mazet-Saint-Voy. L'une des principales thématiques est celle de la mémoire, notamment les œuvres sélectionnées et présentées ci-dessous.

Resnais est avant tout le cinéaste de la mémoire, tout en abordant d’autres thématiques telles que l’engagement, l’intimité, l’imaginaire, la Vie, la musique. Et un hasard jouant un grand rôle dans les destinées de chacun.

Le monde d’Alain Resnais est un ensemble de lieux hantés par les fantômes du passé. Remémorations, souvenirs, poids du passé sont des éléments constitutifs - sans dessiner de trame - d’un monde plutôt fantastique avec de nouvelles lois physiques.

Toute la mémoire du monde (1956)

Lundi 14 août à 21h à la chaumière d’Aulagnier Petit (Mazet St Voy)

A la découverte de la Bibliothèque Nationale, musée des mots où lectures, œuvres précieuses et introuvables, connaissances, catalogues et collections de livres sont enfermés, répertoriés, analysés, classés, notés, étiquetés, enregistrés et consultés.

Un lieu où errent des revenants. Et nous voilà devant cet abîme de disproportion entre le temps d’une vie et un morceau du temps des hommes. Et nous voilà saisi de la peur de l’oubli, l’érosion de la mémoire, la nostalgie des imaginaires périmés.

Les statues meurent aussi (1954)

Lundi 14 août à 21h à la chaumière d’Aulagnier Petit (Mazet St Voy)

Les statues parlent d’une unité perdue et nous disent que l’art est le garant d’un accord nécessaire entre l’homme et son milieu. Le sacré et la vie ordinaire sont intimement liés.

Avec la colonisation, l’art nègre devient un artisanat indigène. Cet appauvrissement esthétique conjugué avec une modernisation exportée par l’Occident (et ne bénéficiant qu’à lui) fabrique lentement le bon nègre rêvé par le bon blanc.

Le foisonnant inventaire montré à l’écran, nous fait saisir la destruction opérée.

Nuit et brouillard (1955)

Lundi 14 août à 21h à la chaumière d’Aulagnier Petit (Mazet St Voy)

Resnais recule les limites de ce que l’on croyait intransmissible. Avec Jean Cayrol (auteur du texte) le ton a été trouvé. De par le ton, il devenait alors possible d’oser montrer ce qui eût été autrement insoutenable. Un ton non répulsif, sans complaisance et sans pardon.

Soulignons le rôle tenu par la musique de Hans Eisler dans ce ton : abandonnés les chants révolutionnaires incitant à rejoindre les rangs, légèreté, neutralité. De même la voix distancée et percutante de Michel Bouquet. Le film est un concerto entre le noir et blanc des archives et la couleur de la vie d’aujourd’hui. En même temps les spectres sont partout, dans la vie ordinaire du camp et maintenant, derrière les herbes folles. « La guerre s’est assoupie, un œil toujours ouvert ». Mais tenons-nous vraiment la lampe allumée ? Loin de tout manichéisme, une ultime interpellation « quelque part parmi nous… »  

Les bourreaux «ont-ils vraiment un autre visage que le nôtre? ». Quand la censure s’énerve et efface le policier de Drancy, la question est bien réelle.

Hiroshima mon amour (1959)

Vendredi 4 août à 21h au Cinémascope du Chambon sur Lignon

Deux personnes de cultures différentes, ayant subi chacune un traumatisme, se rencontrent, ces traumatismes étant insérés aux histoires respectives de leurs pays. Cette rencontre se traduit en amour passionnel, un amour faisant jaillir la vie, débloquant le silence et permettant peut-être de vivre mieux demain.

Le corps et notamment les mains gardent physiquement l’empreinte du passé. Ce rôle du toucher est clairement exposé par des sauts entre parole et image.

Avec le verbe de Marguerite Duras et le regard d’Alain Resnais, Hiroshima mon amour nous prend aux tripes et au cœur. Pas de leçon, juste les faits, dans toute leur intimité. Etonnant, déroutant, admirable, écrira Samuel Lachize. «Fulgurant, terrifiant, plein de douceur, de tendresse et de désir» ajoutera Jacques Doniol Valcroze.

Muriel ou le temps d’un retour (1963)

Jeudi 10 août à 21h à la chaumière d’Aulagnier Petit (Mazet St Voy)

Ici nous sommes vraiment au présent, et qu’y voyons-nous ? Une perpétuelle agitation, vaine et frénétique, étourdie, confuse.

Prenons deux des personnages : accrochée aux épaves de ses souvenirs, vrais ou faux, Hélène surnage, ballotée entre une mémoire oublieuse et une illusion déjà déçue. Pas de retour, quelle que soit notre frivolité, nous sommes chronophages, irréversible  

Impossibilité de faire partager l’expérience vécue de la guerre, la peur, le courage, la lâcheté, la dépersonnalisation. Et de surcroit pour la guerre d’Algérie, la mauvaise conscience de comportements inavouables. Bernard est ainsi emmuré dans le mutisme.

Il en est de la mémoire comme de Boulogne ou de l’appartement d’Hélène un véritable chaos, peuplé d’apparences et de justificatifs. Chacun est à la recherche de souvenirs perdus appropriés à ses besoins et ses angoisses

Ce qui ressort du film, c’est l’absence de conscience collective, y compris au micro niveau familial, chacun est dans sa mémoire à soi, figé dans son passé. Face à cette lucidité, l’affirmation sous entendue que désir et besoin d’amour permettent d’élargir une expérience irrémédiablement solitaire ; bref de permettre de survivre.

Mon oncle d‘Amérique (1980)

Lundi 7 août à 21h à la chaumière d’Aulagnier Petit (Mazet St Voy)

Mon oncle d’Amérique est une œuvre consacrée aux travaux de Henri Laborit sur le comportement. Il est lui-même présent dans le film lors de ses expérimentations effectuées sur des rats accompagnées de ses commentaires. Le film  est focalisée sur trois personnages sous plusieurs niveaux  d’une part leur propre histoire, d’autre part leurs représentations liées au cinéma, chacun ayant son propre héros  ( Jean Gabin, Danielle Darrieux, Jean Marais) ; et enfin leurs propres souvenirs. Fuites, recherche de plaisir, punitions, consommations diverses, justifications parsèment ces vies et dressent un tableau surprenant voire déroutant de notre mémoire. 

Au-delà de cette thématique, l’intervention du hasard est bien mise en avant dans le déroulement de ces vies Thème qui fera  l’objet de Smoking, no smoking quelques années plus tard.

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