mardi, 21 novembre 2023 22:04

Le constat sans appel de la contrôleure générale des lieux de privation de liberté

Dominique Simonnot, contrôleure générale des lieux de privation de liberté|Dominique Simonnot et Jean-François Manier||"Le Chambon, c’est mythique, c’est le village des Justes. J’avais un ami journaliste originaire d’ici, Jean Hatzfeld"|Jean-François Manier||| Dominique Simonnot, contrôleure générale des lieux de privation de liberté|Dominique Simonnot et Jean-François Manier||"Le Chambon, c’est mythique, c’est le village des Justes. J’avais un ami journaliste originaire d’ici, Jean Hatzfeld"|Jean-François Manier||| |||||||

Invitée de la manifestation "Un mois pour les détenu.e.s" , Dominique Simonnot, contrôleure générale des lieux de privation de liberté, a livré un instantané bien désespérant de la situation dans les prisons, particulièrement les maisons d'arrêt.

C'est une invitée exceptionnelle qui a donné une assise à cette édition du "Mois pour...". Lundi après-midi, dans le cadre chaleureux de la librairie-resto L'Arbre vagabond au Chambon-sur-Lignon, une rencontre était proposée avec Dominique Simonnot. Face à une assistance étoffée (assez improbable un lundi après-midi, avouons-le), la contrôleure générale des lieux de privation de liberté a dressé un état de ces lieux bien noir.


Une figure majeure du journalisme judiciaire

Cette figure majeure du journalisme judiciaire qui a couvert des procès pendant 28 ans (on aimait en particulier ses comptes-rendus d'audience dans le Canard enchaîné), est devenue contrôleure générale des lieux de privation de liberté en octobre 2020.

Elle dirige cette autorité administrative indépendante française chargée de contrôler les conditions de prise en charge et de transfèrement des personnes privées de liberté afin de s'assurer du respect de leurs droits fondamentaux, qu'elles soient traitées avec humanité et dans le respect de la dignité inhérente à la personne humaine.


Des portes ouvertes à tout moment

Elle peut visiter à tout moment, de nuit, de jour, le week-end, sur l’ensemble du territoire français, tout lieu où des personnes sont privées de liberté. Une équipe d'une trentaine de personnes concourt à l'exercice de cette mission. Dominique Simonnot a été nommée pour une durée de six ans sans qu’elle puisse être ni révoquée au cours de son mandat, ni renouvelée.


Attentive aux conditions de travail des personnels

Dans le cadre de sa mission, elle s’attache en particulier aux conditions de détention, de rétention ou d’hospitalisation mais aussi aux conditions de travail des personnels et des différents intervenants en ce qu’elles impactent nécessairement le fonctionnement de l’établissement et la nature des relations avec les personnes privées de liberté.


Sur la méthode de travail de l'institution

"On se déplace toujours de façon inopinée dans une prison, l’accueil qui nous est réservé est toujours excellent. Les personnels des prisons savent qu’on peut les aider. On reçoit 3500 lettres chaque année de détenus, de médecins aussi. Cinq équipes partent chaque mois visiter les prisons. On s’appuie sur les signalements, tout en sachant aussi que le silence peut être aussi louche."


La surpopulation gangrène tout

"La vie en prison est immonde, gangrénée par la surpopulation. Les surveillants sont sur le même bateau, ils font face à une impuissance professionnelle. En France, un détenu coûte 110 € par jour. N'y aurait-il pas mieux à faire avec une telle somme ? Je pense qu’il faut que la vie à l'intérieur ressemble à l’extérieur pour que le détenu puisse en sortir meilleur. En Allemagne, 70 % des détenus travaillent, en France, on est à 30 %."

Pour une régulation carcérale

"Les comparutions immédiates fournissent 51 % des prisons. Il faut réformer la comparution immédiate pour obtenir une régulation carcérale. Gouverner, c’est avoir du courage. Plein d’élus connaissent l’état des prisons et ils tiennent toujours un discours d’enfermement. Je comptais beaucoup sur le Garde des Sceaux qui plaidait sur la dignité quand il était avocat. Mais en fait, non."


Une (petite) pointe d'optimiste

"Je préfère aujourd’hui la voie du droit. On s’adresse aux juges administratifs et judiciaires. Les juges administratifs sont beaucoup plus attentifs qu’avant. Suite à nos rapports, on voit des injonctions qui sont faites, ça avance. Je ne sais pas si on y arrivera mais je ne me tairais jamais. Je n’ai jamais rien fait de mieux de ma vie. Il ne faut pas croire au grand soir mais on avance..."


A propos de "Un mois pour les détenu.e.s" 

La manifestation "Un mois pour les détenu.e.s" , portée par l'association Affaire de goûts, a l'ambition de créer l'espace d'une réflexion collective en donnant un coup de projecteur sur ceux qui se retrouvent derrière les barreaux, les institutions qui les accompagnent, les recherches sur la délinquance... Ce mois chemine jusqu'au 3 décembre entre Haute-Loire, Ardèche, Loire, combinant rencontres, expos, conférences, projections, de façon à toucher un public élargi.

Tout le programme est à retrouver ici.

A Tence, on vous invite notamment à apprécier au TEC, une exposition "Tout près d'ici nos prisons".

Dernière modification le mardi, 21 novembre 2023 23:05

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