Samedi, l'association Lire et écouter la Grenette proposait de se confronter à ses talents en orthographe à travers une dictée collective à la médiathèque d'Yssingeaux.
Cette animation a rencontré un large public et a été victime de son succès, les organisatrices étant contraintes de refuser du monde par manque de place.
Le texte, fort ardu, jalonné de chausse-trapes, a été créé tout spécialement pour l'occasion par Pierre Jouve, un ancien instituteur "qui a redoublé 15 fois son CM2" sans pouvoir passer au niveau supérieur. "On ne peut pas dire que le masculin l'emporte sur le féminin", a aussi formulé le Bernard Pivot local en voyant une assemblée essentiellement féminine. Ce délicat exercice d'orthographe a aussi attiré quelques adolescents.
Pour cette première édition, aucun prix ou bonnet d'âne n'étaient attribués mais le plaisir de pouvoir se mesurer aux richesses de la grammaire et de la conjugaison française.
Le texte de la dictée
Si Yssingeaux pouvait parler, elle se confierait à ses gentilés en ces termes : Je m'enorgueillis de mon passé, aussi j'aimerais que vous l'appréciez autant que moi et que vous éveilliez votre curiosité au sujet de l'héraldique que l'on m'a choisie.
Mon toponyme est curieux, encadré par deux lettres grecques, y et x, bien connues des mathématiciens, quels que soient leur niveau et leur époque. Pour moi qui ai des origines gallo-romaines, qui fus emmuraillée au Moyen Age, ce nom bizarre a une étymologie ambiguë. Car si les "cinc dzaus" du parler vellave désignent bien cinq coqs, d'autres orthographes ou vocables, variés, voire fantaisistes, apparaissent sur les cartulaires autour de l'an mil(le).
Quoi qu'il en soit, ces gallinacés ont joué un rôle dans la genèse de mes armoiries "d'azur à cinq coqs d'or crêtés, membrés et barbés de gueules, posés 2, 1, 2, les deux en chef et les deux en pointe affrontés, soutenus en pointe par une fleur de lys d'or".
Il paraît d'ailleurs que, certain dimanche de mi-Carême, des fêtards avinés ont entendu ces réveille-matin coqueriquer à l'envi. Puis, toujours pas dessoulés, dans le défilé des grosses têtes, ils les ont vus se dresser sur leurs ergots en ébouriffant leurs plumes et ils les ont laissés se battre. Qu'on ne croie rien de ces sornettes !
Peut-être mon propos n'aura-t-il plu qu'à quelques spécialistes en onomastique parmi les quelque sept mille Yssingelais. Peut-être auriez vous préféré que mon discours fût plus concret et qu'il évoquât davantage le pays des Sucs.
Faîtes excuse. Ce sera pour une autre fois.