Vendredi soir, à la médiathèque La Grenette d'Yssingeaux, l'assistance est tombée sous le charme de Larissa Andersen-Chaize (1911-1912), dont la Collection le Parc vient de publier un recueil de poèmes.
On a voyagé de Vladivostok à Shangaï jusqu'à la cité des cinq coqs avec cette brillante Yssingelaise d'adoption, poètesse reconnue dans le cercle des Russes immigrés, mais jamais traduite en français jusqu'à la parution de cet ouvrage "Miroirs", né du travail patient de collectage de la journaliste de Vladivostok Tamara Kaliberova, mis en lumière grâce à l'éditeur Martial Maynadier.
Du fleuve Amour au Ramel...
Née à Khabarovsk, sur les rives du fleuve Amour en Russie en 1911 (1910 ? la coquette avait tendance à se rajeunir...), Larissa Andersen est décédée le 29 mars 2012 au pays des sucs ayant dépassé l'âge vénérable de 100 ans, dans sa demeure cachée dans le village de "Montchaud", décorée de tableaux et de photos évoquant sa romanesque existence, un oasis de verdure, paradis des chiens et des chats.
Fille d'un officier du tsar, à l'heure où la révolution bolchevique bouleverse le paysage politique en Russie, la petite Larissa Andersen, avec sa famille, émigrera tout d'abord dans le nord de la Chine, à Horbin, avant de rejoindre Shangaï.
Une bohème aux multiples talents
Merveilleusement belle, douée pour l'écriture, la peinture, la danse, Larissa la bohème s'est débrouillée avec ses talents pour mener sa route, pas toujours tranquille comme celle de la plupart des migrants. Danseuse de cabaret haut de gamme, c'est là, à Shangaï, dans les années 50, au moment où les Russes réfugiés commencent à être en butte aux tracasseries de l'administration de Mao, qu'elle séduit l'Yssingelais Maurice Chaize, inspecteur des messageries maritimes.
Elle choisit alors de l'épouser et de quitter cette Chine qui était devenue sa deuxième patrie. Elle l'accompagnera en Inde, en Afrique, à Tahiti... Dans son périple, elle emportera ses trésors, portraits, photos, costumes de danseuse... Sans oublier son chat, compagnon indispensable, que Maurice Chaize, qui n'avait aucune affinité pourtant avec la gent féline, finira par apprécier pour l'amour de sa divine Larissa.
Rayonnante et bourrée d'humour
Ceux qui ont eu la chance de côtoyer la vieille dame, telles Nicole Chevrier, Germaine Llodra-Marcon, la décrivent comme lumineuse, fascinante, rayonnante, pleine d'humour.
Dans "Miroirs", le recueil issu de la rencontre avec Tamara Kaliberova, vous retrouverez sans doute dans les textes traduits en français toutes ses qualités. Il y a un peu de Colette dans certaines des descriptions de Larissa. On vous conseille notamment la narration de son arrivée à Yssingeaux dans la maison de sa belle-mère. Elle, la belle Larissa, étrangère, "chinoise", originale, débarquant avec son chat dans la très coincée sous-préfecture, donne l'occasion d'un instantané charmant, piquant, savoureux en diable !
Pratique
"Miroirs" livre bilingue (russe-français) de poésies de Larissa Andersen, agrémenté de photos
Traduction française Ekaterina Grigorova-Guilbert et Martial Maynadier
Collection Le Parc
Prix : 12 euros
Voir le site des éditions du Parc ici