L'instruction en famille, aussi appelée l'école à la maison, concerne 100 familles pour 150 enfants en Haute-Loire. A Bas-en-Basset, Vincent et Pauline Giraudat-Gire ont débuté au printemps avec le confinement. Ils racontent ce qui les a motivés et ce qui leur donne envie de continuer alors qu'une loi veut interdire ce mode d'instruction à partir de septembre 2021.
Dans la famille Giraudat-Gire (ou Gire-Giraudat), on a Vincent, 38 ans, directeur de la MJC de Monistrol, Pauline, 32 ans, directrice adjointe du centre de loisirs de Beauzac, et leurs trois enfants, Yaël, bientôt 6 ans, Malo, 4 ans, et Eli, 5 mois.
Le confinement a accéléré le processus
Fin 2021, tout ce petit monde va prendre la route pour un tour du monde dans un camion aménagé, pendant deux ans. Les parents des trois garçons ont donc commencé à plancher sur le sujet en prévision de ce voyage en famille. Sauf que le confinement est passé par là et la famille bassoise a débuté l'instruction à la maison plus tôt que prévu.
"On dit que l'école est obligatoire, c'est faux. C'est l'instruction qui est obligatoire", rappellent ces deux parents, qui avaient envie de s'affranchir des contraintes imposées. "Nos enfants font ce qu'ils ont envie de faire selon leur intérêt et leurs capacités. Et ça fonctionne très bien."
Les enfants ont choisi
Malo aura passé sa petite section et Yaël sera resté toute la maternelle dans un cadre classique. "Après le confinement, on a posé les avantages et les inconvénients sur un tableau. Les enfants ont choisi."
Alors quand le projet de loi sur l'instruction scolaire à domicile « strictement limitée, notamment aux impératifs de santé » à partir de septembre 2021 est sorti, Vincent et Pauline Giraudat-Gire ont marqué le coup. "Je ne vois pas le rapport entre la lutte contre les séparatismes et l'instruction à la maison. C'est stigmatisant. Parmi les radicalisés, la plupart ont bien reçu une instruction à l'école !"
Sociabilisation : il n'y a pas que l'école
La question de la sociabilisation, ils la battent en brèche. "La sociabilisation ne passe pas que par l'école et que par les copains de leur âge. Ça se vit au quotidien, dans le rapport qu'ils peuvent entretenir avec un commerçant du village par exemple ou tous ceux qu'ils croisent. Ou par les activités qu'ils pratiquent dans d'autres cadres."
"Je ne suis pas leur maîtresse, je suis leur maman"
Idem pour l'idée d'école à la maison : "Je ne suis pas leur maîtresse, je suis leur maman", rappelle Pauline. Avec son mari, ils n'ont pas mis de cadre : "On apprend mieux quand on le fait avec plaisir. Au début, ça faisait peur, mais on y arrive très bien. Il faut juste leur faire confiance car l'être humain a toujours besoin d'apprendre. Cette loi est exagérée : qui mieux qu'un parent peut savoir ce qui est bon pour son enfant ?"
100 familles en Haute-Loire
En France, 50 000 enfants sont concernés par l'instruction en famille. Et en Haute-Loire ? 100 enfants sont inscrits dans le premier degré et 50 dans le second degré. Ce qui représente une centaine de foyers. "Les familles ont le choix du mode d'instruction : en famille, en école publique ou en école privée", rappelle Marie-Hélène Aubry, directrice d'académie de la Haute-Loire. "On n'a évidemment pas les mêmes problématiques en Haute-Loire qu'ailleurs. On n'a pas sur le département de questionnement sur les atteintes portées aux valeurs de la République."
Une hausse depuis 2019, deux raisons
Deux tiers des familles pratiquent l'instruction pour des enfants de moins de 11 ans. Ces chiffres ont progressé depuis 2019. Première raison : la loi pour une École de la confiance, promulguée à l'été 2019, abaisse l'instruction obligatoire à l'âge de 3 ans. "Un enfant doit venir toute la journée. Certaines familles ont pu opter pour l'instruction en famille pour éviter cela."
Deuxième raison : le Covid et le confinement du printemps. "Certaines familles ont pu choisir de ne pas faire prendre de risques à leur enfant."
Cinq écoles hors contrat en Haute-Loire
Outre l'instruction en famille, les écoles privées hors contrat sont dans le viseur du projet de loi sur les séparatismes. La Haute-Loire compte cinq établissements du genre, soit environ 80 enfants. "80 enfants sur 40 000 en Haute-Loire", souligne l'inspectrice d'académie qui indique aussi que "les écoles sont inspectées à plusieurs moments".
Depuis la rentrée de septembre, deux écoles sont nées : une école primaire privée Cours Clovis dans l'avenue de la Cathédrale au Puy-en-Velay ; et l'école de la forêt Coucou Hibou à Retournac qui s'appuie sur la pédagogie Waldorf/Steiner.
Dans le Brivadois, la Calandreta Ribeirona, à Vals-le-Chastel, existe depuis 2018.
Et au Chambon-sur-Lignon, deux écoles sont hors contrat : les Cardamines sont nées en 2001, l'école est inscrite hors contrat depuis 2009 ; et l'Escale, toujours dans la commune du Haut-Lignon, est née en 2015.