mercredi, 13 avril 2016 14:30

Les coupes à blanc se multiplient dans les forêts de Haute-Loire

Joseph Guibert, propriétaire à Saint-Jeures, a vendu 2000 stères de bois cet hiver.|La Haute-Loire est boisé sur 40 % de son territoire.|L'hiver doux a permis aux forestiers de pouvoir travailler.|| Joseph Guibert, propriétaire à Saint-Jeures, a vendu 2000 stères de bois cet hiver.|La Haute-Loire est boisé sur 40 % de son territoire.|L'hiver doux a permis aux forestiers de pouvoir travailler.|| Photo La Commère 43|Photo La Commère 43|Photo La Commère 43||
Il s'est abattu beaucoup d'arbres cet hiver. Et les coupes rases se multiplient, conséquence d'un problème de gestion sylvicole des forêts depuis plusieurs décennies.

Des rondins empilés au bord des routes, parfois hauts comme une maison. Ces derniers mois, ces arbres à terre et ces forêts à nu vous ont peut-être interpellés. En prenant attache avec différents professionnels de la forêt, tous nous indiquent qu'il ne s'est pas coupé plus d'arbres qu'avant. Par contre, les coupes à blancs sont plus fréquentes. Certains le regrettent, d'autres le condamnent, d'autres encore le justifient par une mauvaise gestion des forêts privés.


Le marché a été porteur ces derniers mois
La première explication résulte d'un hiver clément et doux, ce qui a permis aux forestiers de pénétrer dans les bois avec leurs engins pour débiter les pins, sapins, douglas, épicéas, et autres espèces comme les hêtres.

Les prix du marché ont aussi incité des propriétaires à vendre leur bois, notamment le petit bois, qui s'est négocié entre 2 et 6 euros net pour le propriétaire. "Quand ce n'est pas favorable, c'est entre 0 et 2 euros", estime Joseph Guibert, propriétaire forestier à Saint-Jeures et ancien agent de l'Office national des forêts (ONF). Il a fait couper 2000 stères cet hiver. "Il faut souvent donner du volume aux entreprises pour qu'elles viennent. Et puis on avait du retard, on a regroupé la coupe de plusieurs années."


On préfère couper les jeunes arbres
Laurent Poyet, exploitant forestier au Mazet-Saint-Voy, convient que le déboisement s'est accéléré. "Avant, ça ne déboisait pas assez. Des forêts sont arrivées à maturité mais personne n'en veut car les diamètres des arbres sont trop gros."

L'hiver a été animé et les scieries ont fait le plein de bois. L'activité a cependant déjà ralenti. "Actuellement, il y a trop de bois sur le marché", estime Joseph Guibert, agent ONF à la retraite.


75 000 propriétaires forestiers en Haute-Loire
La Haute-Loire est connue pour être un département très boisé. Saviez-vous que 40 % du territoire est recouvert de forêts, soit environ 200 000 hectares. On compte 75 000 propriétaires en Haute-Loire, et 90 % des forêts sont privées. Parfois, des personnes ne savent pas qu'elles disposent d'un bois. Vient aussi la question de l'héritage qui peut entraîner ces fameuses coupes à blanc.
"C'est plus rentable dans l'immédiat mais pas sur la durée. Je ne suis pas favorable à la coupe rase, sauf quand on n'a pas le choix", analyse JeanLuc Parrel, responsable départemental au CRPF (Centre régional de la propriété forestière) qui rappelle au passage l'obligation de replanter une parcelle de plus d'un hectare dans les cinq ans qui suivent la coupe. Mais le morcellement des bois en Haute-Loire permet parfois de passer outre cette obligation.

Les filières recherchent beaucoup le douglas. Un effet de mode qui vient de la qualité de cette espèce en terme de séchage rapide. "Le sapin est tro p long à sécher", indique Laurent Poyet.


"En Haute-Loire, on découvre la gestion des forêts
Certains scieurs étrangers au département sont pointés du doigt avec des volumes de coupe importants, notamment pour le bois énergie qui connaît un bel essor avec les constructions de chaufferies bois notamment. "En achetant du bois local, on ne peut pas faire n'importe quoi", se défend Sébastien Celle, scieur à Araules et spécialisé dans la palette. "Il y a davantage de coupes à blanc mais c'est quasiment obligatoire. On faisant des éclaircies, on fragilise les arbres qui restent. En cas de vent ou de neige lourde, le risque est grand de voir les arbres casser." Un avis partagé par le bûcheron Laurent Poyet.

Sébastien Celle critique aussi la gestion des forêts depuis quarante ans. Là aussi, il n'est pas le seul. David Michel, scieur à Yssingeaux et spécialisé dans le bois charpente, partage cet avis : "Les gens font couper leurs bois car ils voient une rentrée d'argent immédiate mais ce n'est pas le bon coup d'oeil. Sur le long terme, ce sera problématique. En Haute-Loire, il faudrait réaliser plus d'éclaircies. J'ai l'impression qu'on découvre seulement aujourd'hui la gestion d'un bois. On abat des plantations jeunes alors qu'on pourrait attendre encore 20 ans."
Dernière modification le jeudi, 14 avril 2016 23:13