"Les paysans ont besoin de revenu !" Ce cri du cœur, ce sont les agriculteurs fédérés au sein de la Confédération paysanne de Haute-Loire qui le poussent, s'adressant avec force à Emmanuel Macron et son ministre Jacques Mézard.
Réunis ce mardi dans le cadre paradisiaque de la ferme des Fromentaux, à Retournac, où Manon Riblet, chevrière, est en cours d’installation, ils laissent parler leurs sentiments. « Ce métier, on l’aime. Si jamais un jour je me lève en n’ayant pas l’envie d’attaquer ma journée de travail, j’arrête net », confie Olivier Vacheron éleveur d’agneaux et veaux à Saint-Vénérand. Une autre embraye : « Il faut être un peu guerrier aujourd'hui pour se lancer, surtout si c'est avec un projet alternatif. Pourtant, c'est simple au fond, nous voulons une agriculture plus humaine et de qualité. » Celui-ci assure : « On en est réduit à devenir des ouvriers de la PAC (politique agricole commune). »
Une détresse économique et humaine croissante
Porte-parole du syndicat pour la Haute-Loire, tout en s'estimant épanoui dans son choix personnel, Olivier Vacheron s’alarme de la détresse économique et humaine d’un nombre croissant d’exploitants. « Dans les fermes, les gens souffrent, se suicident. Face à cette perte de sens du métier, face à la perte de revenu, nous portons un projet cohérent. On a laissé l'agro-industrie s'approprier la plupart des filières. Il faut se les réapproprier. La vente directe est un de ces moyens. Mais ce n'est pas le seul. » Et de citer des productions comme le piment d'Espelette, le fromage Comté qui ont su conserver cette maîtrise.
Refuser la course au gigantisme
La course au gigantisme conduit un peu plus chaque jour l'agriculture dans l'impasse. « Trois fermes à taille humaine valent mieux qu'une grande. Pour résumer, nous préférons trois exploitations avec 50 vaches qu’une avec 150. Mais pour que ce type de projets soit viable il faut que plusieurs conditions soient réunies, notamment au niveau des réserves de terre, de la régulation des productions et du prix d'achat des produits. » Et de s'exaspérer de l'impunité de la ferme aux 1000 vaches : « Ils avaient l'autorisation pour 500 vaches, ils en sont à 800 et personne ne les inquiète ! Nous, si on oublie de mettre une boucle à un mouton, on n'y coupe pas ! Nous réclamons des contrôles équitables. En Espagne, c'est une ferme avec 2000 vaches qui se monte. On compte aller jusqu'où comme ça ? Une seule exploitation avec 20 000 bêtes pour nourrir un pays ? »
Victimes des politiques de libéralisation
Aussi, la Confédération profite de l’élection d’Emmanuel Macron et de l’arrivée de Jacques Mézard au ministère de l’agriculture pour tirer la sonnette d’alarme et les inviter à agir sans délai : « Les paysans sont victimes de crises à répétition provoquées par des politiques de libéralisation. Il faut agir efficacement pour que les paysans reçoivent des prix rémunérateurs. Cela passera par une interdiction d’achat de nos produits en dessous du prix de revient. » Et de réclamer « des actes forts à Bruxelles pour remettre dans les priorités immédiates la maîtrise, la répartition et la régulation des productions agricoles. »
Un besoin de politiques publiques alimentaires et agricoles ambitieuses
Faisant écho à la proposition du président de la République d'organiser des états généraux de l'alimentation, la Conf' rebondit : "Ces assises doivent être l'occasion de mettre en avant une politique de la demande alimentaire pour orienter la production agricole. Avec l'ensemble de la société, les paysans ont besoin de poltiques publiques alimentaires et agricoles ambitieuses. »